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Facturation électronique : calendrier, défis et cas concrets pour une transition réussie

Pour cette troisième édition de notre série "Interview d’experts", nous avons reçu Philippe Perrotin, un spécialiste reconnu dans le domaine de la maîtrise des risques et de la compliance. Fort de plus de 20 ans d’expérience, Philippe accompagne les entreprises à l’échelle internationale dans l’optimisation de leurs processus et la mise en conformité face à des enjeux réglementaires complexes.

La facturation électronique s’impose désormais comme un levier stratégique pour simplifier et sécuriser les opérations des entreprises en France. Philippe nous partage des cas concrets et des exemples issus du terrain, permettant d’illustrer les étapes clés d’une transition réussie. Ensemble, nous passerons en revue les évolutions réglementaires récentes et identifierons les meilleures pratiques pour transformer cette obligation en opportunité de performance et de croissance durable.

Frédéric
La facturation électronique devient une obligation légale dans plusieurs pays européens et notamment en France. Pourrais-tu nous rappeler le calendrier d'application français ?

Philippe
Pour le calendrier d’application français, la réforme avait initialement été prévue pour juillet 2024. Elle a été repoussée et nous avons désormais deux jalons, le premier pour septembre 2026 et le second pour septembre 2027. Il ne faut pas perdre de vue une chose : le premier jalon de septembre 2026 va s’imposer à tout le monde concernant la réception des factures en format électronique. C’est-à-dire qu’indépendamment de la taille de la structure juridique, les entreprises commenceront à recevoir de la part de certains fournisseurs des factures au format électronique. Donc il va falloir avoir la capacité de les recevoir et de les intégrer dans le système comptable. En ce qui concerne l’émission au 1er septembre 2026, seules seront concernées les ETI et les grandes entreprises. 
Le deuxième jalon de septembre 2027 est une date butoir où les PME et TPE devront avoir mis en place la facturation électronique. Si elles souhaitent le faire avant, elles peuvent. En rappelant que la notion de taille s'applique au niveau de l’entité légale. Pour un groupe, on peut donc se retrouver dans une situation où certaines filiales sont des ETI ou des grandes entreprises, donc qui auront l’obligation au 1er septembre 2026, et où certaines filiales sont des TPE/PME. Libre à chaque entreprise de gérer le projet comme elle le souhaite : c’est-à-dire de faire une transition générale pour toutes ses entités pour septembre 2026 ou détaler le projet d’ici à septembre 2027 pour celles qui n’ont pas d’obligation particulière en 2026.

Frédéric
Il y a eu également quelques rebondissements puisque l’État a décidé de ne finalement pas faire l’intermédiaire et désormais tous les flux vont devoir passer par des PDP (plateformes de dématérialisation partenaires).

Philippe
Oui, exactement. Dans la réforme initiale, l’État proposait le PPF (portail public de facturation). Il s’agissait en quelque sorte d’un service d’outil de facturation. Dans la réforme initiale, chacun était libre soit d’accéder directement au portail et de facturer via le portail, soit d’avoir recours à un acteur qu’on appelait les OD (opérateurs de dématérialisation) ou les PDP. Le 15 octobre, par communiqué de presse, l’État s’est désengagé de ce service en confiant au seul PDP la responsabilité de traiter ces flux d’émissions/réceptions de factures électroniques et de dépôt également sur sa plateforme. Le principe d'un agrégateur des factures électroniques sur le portail de l’État subsiste. Ce changement a pour conséquence que désormais, peu importe la société, sa taille ou son secteur, tout le monde devra avoir recours à une PDP. Ces entités seront immatriculées par l’État pour servir d’intermédiaire. Aujourd’hui, nous sommes à peu près à 80 PDP pré-immatriculées qui ont dû répondre à un cahier des charges. Cependant, cette liste est amenée à changer car nous sommes sur un déclaratif de la part des PDP. Il y aura par la suite un pan de certification qui aura probablement lieu courant 2025. Donc seules les PDP qui auront reçu une certification seront immatriculées et pourront jouer le rôle d’intermédiaire.

Frédéric
De ce que tu as pu observer sur le marché, où en sont aujourd’hui les groupes sur le sujet ?

Philippe
C’est relativement disparate. Ce qu’on observe durant nos interventions auprès de nos clients et lors de nos conférences, c’est que c’est un sujet relativement peu avancé pour certains, tandis que pour d’autres, c’est un sujet qui a été très rapidement pris en charge. Notamment par les très grosses structures, type entités du CAC 40, parce qu’elles ont une masse de flux et une complexité importante, il fallait donc démarrer très tôt les projets. Pour les ETI voire les groupes d’une certaine taille, type middle market cotés et non cotés, on est dans un contexte où le sujet commence à germer. Les entreprises réfléchissent à ce qu’il va falloir mettre en place, mais on est encore dans une phase où les sujets n'ont pas été pleinement appréhendés ou traités. Pour le moment, dans notre accompagnement, nous sommes généralement dans une phase d’état des lieux.

Frédéric
J’ai de mon côté étudié le sujet en tant que néophyte et il me paraît extrêmement complexe, avec une attention qui doit particulièrement être portée sur les détails. As-tu des exemples de cas clients qui illustrent cette complexité ?

Philippe
On a des cas clients assez divers. Certains cas sont relativement simples, car ils concernent peu de flux, notamment des flux de type ligne avec des filiales à l’étranger. Cela simplifie considérablement le sujet de l’e-invoicing. Cependant, il y a deux pans dans la réforme : le e-invoicing, qui concerne la facture électronique, et le e-reporting, qui agrège tous les flux échappant à l’e-invoicing (facturation vers les non-assujettis à la TVA, particuliers et B2B international). Ces flux nécessitent des ajustements importants dans les outils de facturation et les schémas de TVA.
Deuxièmement, quand on est dans un groupe très intégré, avec un seul outil de comptabilité, un seul ERP, et une seule base client, c’est relativement simple. En revanche, dans un groupe avec de multiples filiales, chacune ayant sa propre base client mais avec des tiers communs, il y a un travail de fond à mener. Cela inclut le nettoyage des bases clients et la mise en conformité avec les identifiants fiscaux (SIREN/SIRET).

Frédéric
Il faudra aussi être en mesure de traiter et d’appréhender les cas particuliers. Par exemple, un client du secteur retail a été confronté à une situation où un particulier achetant en magasin demande une facture pour le compte de son entreprise. Comment gérer cela ?

Philippe
Effectivement, ces cas peu volumineux mais critiques doivent être pris en compte. Ils nécessitent une nouvelle organisation et parfois des outils supplémentaires pour traiter ces demandes spécifiques qui jusqu’à présent étaient traitées manuellement.

Frédéric
En tant qu'expert en gestion des risques, quels sont selon toi les principaux risques à éviter ?

Philippe
Le premier risque est la désorganisation. Il faut un pilote, un chef de projet, pour s’assurer que chaque partie travaille en bonne synchronisation. Ce projet est transversal et implique l’IT, la finance, le juridique, et parfois les fournisseurs. Il est également crucial d’effectuer des phases de test avant tout déploiement.

Frédéric
Plusieurs pays ont déjà déployé la facturation électronique, comme l’Italie ou le Mexique... Quels sont les avantages de cette réforme ?

Philippe 
Cette réforme offre plusieurs avantages. Elle peut accélérer les flux, optimiser les processus, et réduire les délais de recouvrement, ce qui améliore la gestion de la trésorerie. Cela permet aussi de gagner en conformité et en efficacité.

Frédéric
Merci Philippe pour ces précieux conseils. Nous espérons que cette interview aidera les entreprises à mieux appréhender cette transition cruciale. Merci encore et à bientôt pour une prochaine édition des interviews d’experts.

Philippe 
Merci Frédéric. C’était un plaisir.

Conclusion 

La transition vers la facturation électronique représente bien plus qu’une simple obligation réglementaire – elle s’impose comme une véritable opportunité d’optimisation et de sécurisation des processus financiers. Grâce aux éclairages de Philippe Perrotin, nous avons pu mettre en lumière les étapes clés de cette transformation, les enjeux à anticiper et les meilleures pratiques pour en tirer pleinement parti.
Alors que le calendrier de mise en œuvre se précise, les entreprises doivent dès à présent structurer leur approche, s’appuyer sur des consultants experts et initier les premières étapes de ce chantier stratégique. L’anticipation et la coordination entre les équipes IT, finance et juridique seront des facteurs déterminants pour réussir cette transition en toute sérénité.
Nous remercions Philippe pour ces conseils précieux et cette analyse approfondie, qui, nous l’espérons, permettront à chacun d’aborder cette réforme avec confiance et clarté. Rendez-vous pour notre prochaine édition des Interviews d’Experts, où nous continuerons à décrypter ensemble les grandes évolutions qui façonnent le monde de la finance.

Cet article vous est proposé par Qwincy, leader français du renfort opérationnel et du management de transition au service des Directions Financières et Stratégiques des entreprises. 
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Marie dupont

Vice-président chargé du développement économique à la communauté d'agglomération de Cambrai

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